
Je suis professeur de Sciences de la Vie et de la Terre (SVT) dans le secondaire (lycée) et formatrice auprès d’étudiants et de stagiaires qui souhaitent devenir professeurs de SVT.
J’ai découvert les habiletés de l’approche Faber/Mazlish en tant que parent, avant de les expérimenter en tant qu’enseignante (collège et lycée) puis formatrice.
Ces habiletés me sont utiles dans ma relation avec les étudiants.
Accueillir leurs sentiments lors de discussions m’a permis de mieux les comprendre, et leur est profitable d’après les nombreux retours positifs que j’ai eus de leur part : beaucoup me remercient pour ma bienveillance. C’est également le cas lors des visites de professeurs stagiaires (lorsqu’ils sont en stage en collège/lycée, et qu’ils sont visités pour que leur pratique professionnelle soit évaluée). J’ai également accueilli les sentiments des étudiants au cours d’une réunion lorsqu’ils faisaient part d’un incident vécu douloureux… avant qu’un collègue ne prenne la parole, à ma suite, sans accueillir les sentiments mais en entrant dans les explications et les justifications (disons que nous ne voyions pas les choses de la même façon…).
Le principe du compliment descriptif m’a aidé à formuler mes remarques lors des entretiens au cours des visites de stage. J’ai l’impression que ça a aidé les professeurs stagiaires à développer une analyse réflexive de leur pratique, et à prendre confiance en eux. Plusieurs m’en ont remerciée.
Concernant les étudiants que nous préparons au concours de recrutement (le CAPES), nous avons également choisi, en équipe de formateurs, de leur donner une part active lors des oraux blancs de CAPES : ils sont chacun invités à prendre, pour une séance, le rôle de jury à nos côtés. Ceci leur permet de sortir du rôle de candidat dans lequel ils sont enfermés. Prendre le rôle de coexaminateur pour un temps leur permet de découvrir qu’ils savent bien plus de choses que lorsqu’ils sont dans le rôle du candidat interrogé ; ceci leur permet de réaliser l’impact du stress vécu en tant que candidat pour mieux relativiser celui-ci et prendre confiance en eux.
Bien entendu, dans ma relation avec eux, je ne peux pas expérimenter toutes les habiletés de Parler/écouter, comme par exemple le fait de remplacer un ordre ou la punition.
Par contre, je leur parle des habiletés dans leur ensemble lors de mes cours de pédagogie, afin qu’ils découvrent des compétences qu’ils pourront utiliser eux-mêmes en tant qu’enseignants.
C’est le cas lors de mon cours « Gestion de la classe » : je leur fais notamment vivre l’exercice « du patron » (1ère séance de l’atelier « Parler pour que les enfants écoutent,… ») qui a permis de réelles prises de conscience et de belles discussions par la suite.
Dans ce cours, je me permets également de souligner un point qui me paraît essentiel à l’heure de « l’école de la bienveillance » : ce terme de bienveillance est complètement galvaudé et souvent confondu avec le laxisme, ce qui génère un profond malaise chez de nombreux enseignants, et a – à mon sens – des conséquences néfastes sur les élèves. L’approche Parler/écouter me semble maintenir des exigences salutaires : il s’agit d’accueillir les sentiments tout en limitant les actions, et d’exprimer des attentes de façon claire. C’est particulièrement nécessaire dans une société qui fait globalement le contraire (ne pas accepter que les enfants expriment leurs sentiments désagréables, tout en les laissant faire ce qu’ils veulent au final).
Lors de ces cours, les étudiants ont généralement manifesté un grand enthousiasme, au point que quelques-uns ont choisi de faire de ce thème leur sujet de mémoire de recherche.
En effet, enseigner dans un cadre universitaire suppose de faire appel à la recherche. Ainsi, j’ai pu faire référence notamment aux travaux de la Professeure Mageau et de son équipe (dans le cadre de la théorie de l’autodétermination), ou à ceux de Daniel Favre (concernant la déstabilisation cognitive et affective dans le cadre d’une situation-problème).
Au-delà de la demande institutionnelle, cela me permet d’une part de faire le lien avec le monde de la recherche en éducation et d’autre part d’asseoir les principes de l’approche Faber/Mazlish de façon crédible dans le milieu universitaire.
En conclusion, l’approche Faber/Mazlish m’est utile dans ma pratique professionnelle, que ce soit dans ma propre relation avec ces jeunes adultes, ou lors de mes formations afin de leur donner envie d’utiliser ces principes dans leur enseignement. L’ancrer dans la recherche m’a permis d’en augmenter la crédibilité.
Cela donne envie à certains d’en découvrir encore plus. Récemment, une étudiante me disait très justement : « En fait, c’est valable pour toutes les relations ».
“Cet angle de vue est profitable,
même pour de vieux tuteurs comme nous.”
Cette approche s’est avérée également profitable lorsque j’ai animé une formation de tuteurs de professeurs stagiaires. J’ai fait vivre à ces tuteurs l’exercice « du patron » mentionné plus haut. Cela a permis une riche discussion sur l’accueil des émotions du professeur stagiaire, en tant que tuteur. L’une des participantes m’a envoyé par mail un retour enthousiaste, pour cet angle de vue qu’elle estimait profitable, m’a-t-elle dit, « même pour de vieux tuteurs comme nous ».