Dans cet article, une enseignante nous partage son expérience : elle a notamment utilisé la résolution de problème de Faber et Mazlish avec ses élèves. Cette professionnelle rencontre de nombreux défis au quotidien car elle enseigne dans un “quartier prioritaire” en tant qu’enseignante d’éducation spécialisée d’une école élémentaire d’Harlem (quartier nord de Manhattan à New York, États-Unis). Voici son témoignage.
De nombreux enseignant·e·s vous le diront, dans une classe il y a des problèmes qui sont si épineux et bouleversants, qu’ils ne peuvent être résolus par une simple phrase, un mot ou une note.
Pour ces situations complexes, un ensemble d’habiletés peuvent être mobilisées. La résolution de problèmeoffre une méthode, étape par étape, pour prendre les besoins de tou·te·s en considération. Pour résumé, qu’elle soit utilisés avec un·e seul·e élève ou avec toute une classe, la résolution de problème s’utilise ainsi : écouter les sentiments des enfants, exprimer ses sentiments d’adulte et ensuite, travailler ensemble pour trouver des solutions acceptables pour tou·te·s.
« Nous avons été profondément touchées par l’expérience de cette enseignante. Il aurait été tellement facile de classer ces enfants comme des « cas désespérés ». Pourtant, elle a osé croire en eux et ils ont pris la responsabilité de leurs comportements. »
La résolution de problème : une démarche collaborative pour améliorer le climat scolaire
Malgré ses doutes, l’enseignante a décidé d’essayer la résolution de problèmes pour voir ce qu’elle pourrait en tirer. Voici des extraits de son rapport :
« Au premier abord, ça ressemble au genre d’approche qui pourrait parfaitement convenir à des enfants de classe sociale moyenne, mais mes élèves sont issus de milieux défavorisés. Beaucoup d’entre eux sont victimes d’abus physiques et émotionnels. Ils arrivent à l’école comme des pétards prêts à exploser. Je ne peux pas passer une période sans qu’une dispute éclate. Si l’un d’entre eux dit une insulte ou donne un coup de pied sous la table, c’est la fin de ma leçon. Si je veux accomplir quoi que ce soit, il faut que je joue à la policière. »
Je me suis dit que, si la première étape de la résolution de problèmes consiste à trouver comment les jeunes se sentent réellement par rapport aux disputes, je devrais commencer par leur demander ce qu’ils y trouvaient de valable.
Voici la liste que nous avons dressée ensemble en classe :
Les bons côtés des disputes :
1. Rendre les coups ! (de loin la réponse qui revenait le plus souvent)
2. Embêter quelqu’un
3. Inciter l’autre à me pourchasser
4. Répondre du tac au tac (insulter) est amusant
5. Pour ne plus être embêter
6. On en a envie
7. Ce sont les autres qui ont commencé
8. Le cours est ennuyeux (contribution de l’enseignante)
9. Mettre quelqu’un en colère
10. C’est amusant de jouer au dur
Les élèves étaient plutôt turbulents pendant que nous rédigions la 1ère liste. J’ai ensuite demandé : « Quels sont les mauvais côtés des disputes en classe ? » et le ton est devenu sérieux.
Les mauvais côtés des disputes :
1. Après une dispute avec un·e ami·e, on se sent mal
2. On peut avoir des ennuis – avec ses parents, l’enseignant·e, le directeur/la directrice
3. Ça met l’enseignante de mauvaise humeur (contribution de l’enseignante)
4. On peut faire mal à quelqu’un
5. On peut se faire renvoyer
6. On n’apprend rien (contribution de l’enseignante)
7. Ça peut dégénérer
8. On peut être blessé, tapé, égratigné, mordu ou finir avec un œil au beurre noir
Les solutions possibles :
1. Demander la permission de sortir pour relâcher la pression
2. Le frapper
3. S’éloigner
4. Se défouler sur de la pâte à modeler
5. Serrer des balles anti-stress
6. Casser un bâton
7. Appeler les parents de cette personne
8. Les laisser se bagarrer dans le gymnase sans spectateur
9. Le dire à l’enseignante
10. Changer de place
11. Lui dire de me ficher la paix
12. L’envoyer chez le directeur
13. Lui faire écrire quelque chose 100 fois
14. Lui faire lécher le sol
15. Tout le monde lui donne un coup
16. Donner des autocollants à ceux qui suivent le règlement
17. Lui écrire quelque chose de méchant
18. Lui répondre par un mot gentil pour le gêner
Après avoir dressé cette liste de 18 points, j’en ai commenté quelques-uns. Par exemple, j’ai dit aux élèves que je ne pouvais pas leur permettre de se battre, parce que je ne voulais pas qu’ils se fassent mal. De plus, lécher le sol ne me semblait pas très hygiénique. Ils avaient tous des convictions très fermes à propos du reste de la liste, chacun ayant ses préférences. Après avoir prolongé la discussion et ajouté d’autres suggestions, nous avons décidé que chaque élève devrait noter dans son cahier les solutions qui lui paraissaient les plus sensées.
“À la fin de la leçon, nous avons écrit au tableau les règles de la classe sur lesquelles nous étions tou·te·s. d’accord : 1. Aucune insulte 2. Aucune grossièreté 3. Ne pas rapporter ce que font les autres à moins d’être ennuyé par quelqu’un 4. Ne pas frapper les autres ni lancer d’objets 5. Utiliser ses propres solutions !!!”
règles de vie d’une classe d’une école élémentaire établie grâce à la résolution de problème de l’approche Faber et Mazlish
La co création des règles de vie de la classe pour un climat apaisé
Voici concrètement les effets de ce processus sur le climat en classe :
• Luis, celui qui est le plus susceptible, sort de la classe plusieurs fois par semaine. Il reste sur le pas de la porte afin de ne rien manquer. Après un certain temps, il revient et s’assied au fond de la salle. Puis, au bout de quelques minutes, il nous rejoint.
• De temps à autre, un élève bondit et dit : « Carlos, change de place avec moi ! » et chacun s’assied à la place de l’autre. (Carlos cède toujours son siège sans faire d’histoires.)
• À deux reprises, un élève s’est vigoureusement défoulé sur de la pâte à modeler.
• Denis a dit : « Donnez-lui de la pâte pour qu’il se défoule ! »
• Si des élèves s’insultent, la classe crie : « Règle n°1 ! », « Règle n° 2 ! » ou « Faites-lui lire le règlement ! » et le « fautif » s’exécute.
• Ils ont aussi décidé qu’ils n’insulteraient pas la poubelle. (Quand Denis a dit : « Ta mère » en s’adressant à la poubelle, Luis a cru qu’il s’adressait à lui et ils se sont mis à se disputer. La classe a alors ajouté une nouvelle règle : “ne pas injurier les objets”.)
Les dernières lignes de la lettre de cette enseignante résument sa pensée et celle d’Adele Faber et Elaine Mazlish : “J’aimerais pouvoir dire que la mise en pratique de la méthode Parler/Écouter de Faber et Mazlish m’est venue tout naturellement : ce n’est pas le cas. Il m’a fallu réfléchir, faire des efforts et y consacrer beaucoup plus de temps que je ne l’aurais voulu. Il m’aurait été beaucoup plus facile d’abandonner ces enfants à leur sort en les classant dans la catégorie des « incorrigibles » ou des « cas désespérés ». Pourtant, en les traitant comme des personnes capables de résoudre des problèmes, c’est ce qu’ils sont devenus.”
Enseignante d’éducation prioritaire d’une classe d’une école élémentaire
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